Chronique de Jacques Ladyjensky N°2, novembre 2020

Aujourd’hui, j’en reviens à notre époque contemporaine avec la problématique DMLA/nutrition.

L’idée que le régime méditerranéen lutéiné est bénéfique fait des progrès, mais trois objections demeurent bien vivaces.

  • La première étant, bien entendu : peut-on réellement en être convaincu, par des preuves scientifiques ?
  • La seconde vient des lobbys alimentaires multinationaux, qui sont « contre », – du moins jusqu’ici. Ci-dessous, nous allons traiter de ces deux-là.
  • La troisième, la prétendue austérité du régime méditerranéen, sera abordée dans notre prochaine chronique, recettes culinaires à l’appui.

Plusieurs études de haut niveau sont recensées dans mon livre CULINAIRE OCULAIRE, et parmi elles notamment :  L’étude dite « des Sept Pays » sur 16 cohortes minutieusement suivies, l’étude Lyon Diet Heart Study, la gigantesque étude cumulative de F.Sofi et al. portant sur 514 000 individus, et puis aussi, mais j’en passe, les recommandations de l’OMS et sa Mediterranean  Diet Pyramid.

Et  pour la troisième année consécutive à présent, le magazine US News & World Report, surnommé judicieusement « the Global Authority in Ranking and Consumer Advice », qui lui donne (sur quarante) le rang numéro  1, Best Diet Overall.

Ce que je viens d’énumérer concerne surtout la longévité en général.

En matière de DMLA plus précisément, l’examen de l’effet bénéfique du régime dit  « méditerranéen » est plus récent.

Il faut d’abord citer les études mentionnées dans mon livre, et aujourd’hui je voudrais en énumérer d’autres encore.  Celles du livre sont d’abord celle de Clinical & Experimental Ophthalmology de juin 2018, très convaincante, résumant dix-huit études venant de paraître. Et puis celle de 2015 à laquelle le Professeur Johanna M. Seddon, MD,ScM, a contribué, pendant quinze ans, portant sur les 2.525 sujets de l’étude Areds, chez qui 1.028 yeux avaient évolué en DMLA avancée.

Ensuite ont été recensées l’étude du British Journal of Nutrition de mai 2014 (bonne corrélation entre incidence de DMLA avancée et faible consommation de produits laitiers) et l’étude européenne Rotterdam/Alienor publiée en 2018 sur 4.446 plus 550 participants, pour lesquels le degré d’adhérence au régime était évalué par un score dit « MeDi » de 1 à 9, qui évoque un peu le « Nutri-Score » qui allait apparaître peu après. Une réduction du risque d’’une valeur assez confondante (41 % !) était apparue, mais pour la DMLA avancée, pas pour la débutante. Le Dr. Johanna M.Seddon a également participé à cette vaste étude.

Depuis lors, on est occupé à en relever d’autres, comme celle de mai dernier dans le prestigieux Invest.Ophthalm.Vis.Sci. (avec à nouveau la collaboration de l’omniprésente Dr.J.M. Seddon) ; on y lit que le régime méditerranéen réduit la croisssance des drusen.

En France, le renommé Bulletin de l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) a fait paraître un article qui a du retentissement : « Réduire le risque de DMLA en adoptant une alimentation méditerranéenne » (on remarquera le degré de « prudence » de certains titres…) qui reprend les résultats des études de Rotterdam et Alienor mentionnées ci-dessus. Hélas, il y a un biais dans cet article, dont la phrase-clé est : « le risque de développer une DMLA (apparait) plus faible de 41% chez les personnes dont l’alimentation est très fortement méditerranéenne ». En réalité l’étude mentionne ce chiffre « pour les cas de DMLA avancée » et ne parle pas des autres.

Venons-en à la question de l’attitude des lobbys multinationaux de l’alimentation vis-à-vis du Régime Méditerranéen, qui était, comme on sait, plutôt négative jusqu’ici. Il semble bien que le vent tourne, en particulier depuis l’introduction du Nutri-Score.

Issu du gouvernement français, le Nutri-Score a été assez rapidement adopté par la Belgique, puis par l’Allemagne. Il donne des cotes de A  à  E  aux aliments, en recommandant de favoriser l’achat des A et des B, qui sont généralement des végétaux comme dans le régime méditerranéen. Les lobbys ont assez farouchement combattu le Nutri-Score au début, mais récemment deux grosses multinationales ont fait volte-face :  Nestlé et la multinationale charcutière Herta. Ce qui ne va pas sans tempêtes dans les conseils d’administration des autres.

Donc de côté-là, pour notre Régime Méditerranéen les pronostics sont bons.

Reste à discuter de son côté prétendument austère. Recettes culinaires à l’appui, nous allons aborder ce sujet dans ma Chronique N°3.

Par Jacques Ladyjensky , M.E., journaliste scientifique